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Une statistique disait récemment que la blanquette est le plat préféré des français. Ce qui me laisse dubitative, non pas que je n'aime pas la blanquette, loin de là, mais parce que je suis bien incapable de dire quel est mon seul plat préféré parmi tous : j'aime trop de choses !

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Il y a toute la tendresse du monde dans ces morceaux de veau longuement cuits dans un bouillon, et enrobés d'une sauce couleur ivoire. Souvent on ramène la blanquette à un souvenir d'enfance, une mère ou une grand mère. La blanquette a la douceur des souvenirs des premières années, qu'on enjolive et qu'on transforme en légende. La blanquette possède l'éternelle jeunesse des plat de l'enfance.

Parfois c'est un souvenir littéraire que la blanquette nous évoque : on se rappelle que le commissaire Maigret anticipe avec émotion celle que lui prépare son épouse. Et aussi celle du repas — démentiel pour nous au XXI° siècle— que décrit Émile Zola dans l'Assommoir. Ce repas commence par un potage aux pâtes d'Italie, puis vient le boeuf du pot au feu, ensuite la blanquette, puis une épinée de cochon flanquée de pommes de terre, des pois au lard, et enfin une oie rôtie suivie d'une salade de romaine. Et pour le dessert, un gâteau de Savoie, accompagné de fromage blanc et de fraises. Desserrez votre ceinture et bon appétit !

En tout cas on ne se lasse pas de le lire :

Ah ! tonnerre ! quel trou dans la blanquette ! Si l’on ne parlait guère, on mastiquait ferme. Le saladier se creusait, une cuiller plantée dans la sauce épaisse, une bonne sauce jaune qui tremblait comme une gelée. Là-dedans, on pêchait les morceaux de veau ; et il y en avait toujours, le saladier voyageait de main en main, les visages se penchaient et cherchaient des champignons. Les grands pains, posés contre le mur, derrière les convives, avaient l’air de fondre. Entre les bouchées, on entendait les culs des verres retomber sur la table. La sauce était un peu trop salée, il fallut quatre litres pour noyer cette bougresse de blanquette, qui s’avalait comme une crème et qui vous mettait un incendie dans le ventre.

Une bonne bougresse de blanquette, c'est justement ce qu'il nous faut, pour nous mettre de bonne humeur en ces temps hivernaux. On prendra soin de doser le sel comme il faut, nous. Et on boira juste un petit peu de vin, mais du bon, un bon vin blanc aromatique et fruité, un blanc de Loire par exemple, un Sancerre ou un Chinon. On peut même essayer un rouge soyeux, tendre et velouté.

Sachez, lecteurs et surtout lectrices, que le veau est une viande maigre. Lorsque votre bouillon restant sera refroidi, vous remarquerez qu'il a très peu d'yeux ! Son regard ne vous fera aucun reproche. Il n'y a donc aucune mauvaise raison pour se priver de ce petit délice. La crème ? Oui, et alors ? 150 g de crème pour 6 personnes, cela fait 25 grammes par personne, pas de quoi en faire une histoire ! Vous vous passerez de chantilly sur votre dessert, et tout ira bien.

Pour 6 personnes :

veau1,5 kg de veau à blanquette
2 l de bouillon (ou d'eau)
2 belles carottes, ou plus
1 blanc de poireau
1 branche de céleri
1 oignon piqué de 2 clous de girofle
1 bouquet garni
200 g d’oignons grelots
70 g de beurre
1 cuil. à café de sucre
250 g de champignons de Paris
30 g de farine
4 jaunes d’œuf
15 cl de crème liquide
Sel, poivre du moulin

Quelques conseils avant de commencer, car c'est dans les petits détails que se fait toute la différence :
La viande : demandez au boucher de vous mettre des morceaux de veau avec et sans os. Les os donneront plus de goût à la blanquette. Demandez du tendron et du bas de carré ou de l'épaule. On choisit la viande de veau d'un joli rose nacré, avec le grain serré et la graisse blanche et ferme. On les coupe en cubes de 4-5 cm maximum.

Le bouquet garni : c'est le petit paquet dans la feuille de poireau que vous voyez sur la photo ci-dessus.  Du thym, du laurier et quelques tiges de persil. Je les enferme dans le poireau, et ainsi je peux facilement les récupérer dans la sauce à la fin de la cuisson.

Le bouillon : prenez de préférence du bouillon maison, de légumes ou de veau. Moi je réutilise le bouillon de la précédente blanquette que j'ai congelé dans une boîte hermétique, je le rallonge simplement avec un peu d'eau. Et la toute première fois ? j'avais mis de l'eau, tout simplement, et c'était quand même déjà très bon. Vous imaginez qu'au fil des utilisations, ce bouillon prend de plus en plus de saveur !

Les oignons grelots : ils existent en version surgelée chez Picard, c'est très pratique, on n'a même pas la peine de les éplucher. Si vous n'en avez pas, ce n'est pas un drame et pas une raison pour ne pas faire la blanquette.

Les champignons : on les choisit petits, bien blancs et bien fermés, signe de fraîcheur. On ne les épluche pas, il faut juste ôter la partie sableuse du pied. On les rince très rapidement, sans les laisser tremper dans l'eau, et on les coupe en 4 s'ils sont gros. Si les champignons rendent du jus dans la poêle, ajoutez ce jus dans la cuisson du veau.

On commence :
Mettez la viande dans un faitout, ou une grande cocotte. Couvrez avec le bouillon, la viande doit baigner confortablement. Salez et portez à ébullition. Écumez soigneusement, jusqu'à ce qu'il n'y ait plus d'écume qui se forme. Complétez éventuellement le niveau de l'eau, si l'écumage l'a fait baisser. Ajoutez ensuite les carottes épluchées et coupées en rondelles, le poireau nettoyé, le céleri effilé, l’oignon piqué, le bouquet garni, et quelques grains de poivre blanc. Faites mijoter à toute petite ébullition pendant 2 h.

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Pendant ce temps, épluchez les oignons grelots. Faites-les caraméliser dans une casserole avec une noisette de beurre et le sucre. Tournez-les dans la casserole afin que la couleur soit uniforme. Nettoyez les champignons. Faites-les revenir à feu vif dans une poêle avec du beurre et 1 pincée de sel.

Quand la viande est cuite, égouttez-la et réservez-la dans un plat creux, en compagnie des champignons et les oignons. Dans une casserole, faites cuire 30 g de beurre avec la farine pendant 2 minutes. Laissez refroidir. Passez le bouillon de cuisson du veau. Versez-en environ 50 cl dans la casserole et faites épaissir en remuant avec un fouet.

Délayez les jaunes d’œufs dans la crème liquide. Hors du feu, versez le tout dans la sauce, puis portez à feu doux tout en remuant avec une cuillère en bois, jusqu'à ce que ce soit lié. Goûtez et rectifiez l'assaisonnement. Nappez le plat de sauce et servez le reste en saucière.

On accompagne traditionnellement la blanquette avec des petites carottes et des pommes de terre à la vapeur. Mais c'est aussi très bon avec du riz ou des pâtes !

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Que faire du bouillon restant ? Vous pouvez le déguster en soupe avec des petites pâtes. Moi, je le congèle et je le garde pour que la prochaine blanquette soit encore meilleure, comme je l'ai expliqué plus haut.

Voici aussi quelques variantes sympathiques :
Ajoutez dans la sauce une grosse poignée d’herbes fraîches hachées.
Faites cette blanquette avec du lapin, une poule, une épaule d’agneau de lait, ou avec du chevreau.
On peut aussi faire une variante au poisson, mais alors la cuisson ne dure qu'une dizaine de minutes !

N'oubliez pas aussi que vous pouvez augmenter les quantités, car c'est encore meilleur réchauffé.

Et vous, chers lecteurs avez-vous un plat préféré ?

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