La Vache et le prisonnier

Ce clip, réalisé par des éleveurs laitiers basques, est la chose la plus belle et la plus intelligente que j'aie vue sur internet depuis longtemps. À regarder et écouter en mettant le son, jusqu'à la dernière image  car la chute est excellente.

Ça pourrait se passer de commentaires. Mais ça nous interpelle !

On pourrait se dire : je vais arrêter d'acheter des produits laitiers industriels. Certes c'est bien. Si plus personne n'achetait de beurre ou de camembert du type qui veut manger son chapeau ou l'autre imbécile qui emporte son mauvais calendos quand il est invité à dîner chez des amis (tout le monde a vu ces pub au moins une fois), cela aurait un impact. Mais c'est plus facile à dire qu'à faire. Moi même je ne me rappelle même plus de la dernière fois où j'ai acheté un camembert pasteurisé, ça fait des lustres. Mais je n'ai aucun mérite car je n'ai pas de difficulté à m'approvisionner, j'habite à la campagne et je trouve facilement des produits artisanaux, et même du vrai lait de ferme. J'ai aussi un très beau marché où les produits sont moins chers qu'en grande surface. Une chance.

Comment, dans la pratique, cesser d'acheter des laitages industriels? C'est presque impossible. Comment fait-on quand on habite en ville ou en banlieue ? Quand on ne peut pas faire autrement que d'aller s'approvisionner en supermarché ?  Quand on a des enfants et qu'on doit acheter 12 litres de lait par semaine, comment faire autrement que d'acheter des packs de lait en brique?  Le fait est que le marché des produits laitiers est entièrement noyauté par l'industrie : il est quasi impossible, en France en 2013, d'acheter du lait de vache qui n' ait pas été transformé, du lait simplement sorti d'une vache et mis dans une bouteille ou un autre emballage. C'est un produit rarissime ! 

(Au passage, ne croyez pas que le lait en brique ou en bouteille plastique est du lait sorti tel quel d'une vache, puis mis dans la brique et stérilisé. Les industriels le reconstituent à partie de poudres d'éléments du lait, lactose, calcium, matière grasse, etc. pour faire les différentes sortes, entier, demi écrémé, vitaminé, etc. Ça ne vous étonne pas, vous, de pourvoir le garder 15 jours entamé sans qu'il tourne ? — si, j'ai fait l'expérience).

Prenons conscience que dans "la vache et le prisonnier ", le prisonnier, c'est sans doute l'éleveur, mais c'est aussi vous et moi : c'est le consommateur qui n'a plus du tout le choix de ce qu'il mange !

L’industrie agro alimentaire contrôle entièrement notre alimentation. Elle constitue actuellement le secteur le plus important de l’économie en terme de chiffre d’affaire, elle devance toutes les autres industries, et tout le monde sans exception consomme ses produits. Des enjeux économiques énormes sont liés à cette industrie qui cherche à grandir encore et toujours. Une poignée d’entreprises multinationales (Monsanto, Nestlé, Unilever, Lactalis, etc...) contrôlent entre les deux tiers et les trois quarts du marché mondial. Partout elles rachètent une par une les petites entreprises artisanales, elles les englobent, ou bien elles les ferment  pour ne plus avoir de concurrence, ce qui les fait encore grandir plus. Elles ont un pouvoir économique considérable. En réalité, elles possèdent la maîtrise totale du système alimentaire marchand dans tous les pays où elle est implantée. Ce pouvoir, dans certains cas, est supérieur à celui des institutions politiques. Quand on contrôle la nourriture, ce qui est indispensable à la vie, on contrôle tout : la vie et la mort des gens. Oui, ça peut aller loin.

(Tiens, pour prendre un seul exemple, près de chez moi il y avait encore deux petite usines de lait qui collectaient et vendaient dans la région, eh bien elles se sont fait "restructurer" et vont disparaître ! CLIC.)

Comment faire pour signifier qu'on n'est pas d'accord avec ce système ?

On peut commencer par utiliser l'internet pour partager le clip afin que le maximum de consommateurs prenne conscience du problème. Cela semble une lutte du pot de terre contre le pot de fer. Sauf que là c'est carrément le pot de cristal contre celui en acier inoxydable. Mais n'oublions pas que l'industrie n'est rien sans les consommateurs et leur sacro-saint "pouvoir d'achat" dont on nous rebat les oreilles.  Le pouvoir d'achat n'est un réel pouvoir que si on ne l'utilise pas ! 

Ceux qui ont la chance d'avoir le choix peuvent privilégier les Amap, ou les groupements de producteurs en vente directe qui se développent de plus en plus dans toutes les régions, les circuits courts, les artisans, les petits commerçants. Ils peuvent autant que possible éviter d'aller faire leurs courses dans la grande distribution, ou y aller moins, Ils feront des économies de temps, de carburant, et des économies tout court car c'est une idée reçue que tout est moins cher en grande surface.

Vous comprenez maintenant pourquoi vous ne lirez jamais sur ce blog une promotion pour un quelconque aliment industriel. Et vous ? Vous avez d'autres idées pour sortir de cet emprisonnement ?

Comments

[NICOLE]

Merci pour le clip !!

Depuis plusieurs année, notre famille ne consomme plus de produits laitiers (beurre, yogourt, etc...) Je m’inquiétait pour mon fils qu'il n'ai pas assez de calcium et à ma grande surprise lors d'une prise de sang, il en avait suffisamment pour son âge. Je compense tout cela avec une alimentation suffisamment riche (pois chiches, lentilles, laits végétaux, etc) et des eaux minérales riches en calcium.

Nous essayons de manger sainement et avec peu de viande (pas de poulet de batterie, ni de poisson d'élevage, etc...). Beaucoup de légumes et légumineuses.

Bref, mon fils de 15 ans, mange à sa faim et à priori notre famille est en bonne santé !!!

Essayez les crêpes et le riz au "lait" au lait végétal d'amande (excellents...). Imaginez le changement pour un breton. Aujourd'hui, il ne veut plus de crêpes au lait de vache, sauf si c'est bio ou issu d'une petite ferme qui n'a pas de quota.



Enfin, les industriels cherchent à produire plus (intérêt financier) au péril de la terre et des générations futures.

[léa]

Sinon pour faire plus simple il vous suffit juste d’arrêter de consommer des produits laitiers industriels ou non, vous verrez cela est très bénéfique pour votre santé et en plus pour la vache, qui aimerait qu'on arrête de l'engrosser à tout bout de champs pour ensuite lui enlever son veau, le tout pour votre simple plaisir gustatif bien sur.

[Boubelinde]

Formidable ! Je m'en vais fouiller à la médiathèque, et acheter du lait cru au marché, ce sera ma première fois en bonne rate des villes ! Je n'ai pas réussi à convaincre mon père concernant son riz au lait, il a foi en l'industrie, je le lui referai. Par contre ma tarte aux pommes lui a arraché des MMmm significatifs, c'était tellement bon et fondant avec le beurre de ferme et la crème crue, que je ne saurai plus la faire autrement.

Si je trouve l'article je le partagerai, très bon week-end à vous

[Boubelinde]

On a ici un débat passionnant. Pour ma part je n'ai ni eau ni lait à apporter à votre moulin, juste des questions qui me taraudent depuis la lecture de cet article. J'ai cherché vainement des compléments d'information sur le lait de nos grandes surfaces, qui selon votre petite parenthèse à l'allure inoffensive n'est qu'une reconstitution. Marie-Claire, pouvez-vous me dire où trouver ces détails ? Internet n'est pas très bavard à ce sujet, évidemment... Merci !

[Natalie FH]

Michel, pardon, mais il me semble que vous confondez tout.

Les gros céréaliers, et les petits éleveurs, ce n'est absolument pas la même chose.

L'herbe est toujours plus verte, etc...



Déjà, ne confondons pas patrimoine et revenu !

Bien sûr, un "paysan" peut avoir un patrimoine qui paraîtra important... c'est son outil de travail ! Personne ne lui en a fait cadeau et il paie, chèrement, des crédits pour un matériel qu'il lui faut sans cesse renouveler (entre usure et normes qui changent constamment).

Penchez vous sur le revenu d'un éleveur. Qui travaillerait 7 jours sur 7, 12 mois sur 12, pour un revenu de misère ? La plupart n'ont pas même l'équivalent d'un revenu minimum.

Ceux que j'ai pu rencontrer dans ma vie privée comme professionnelle (je suis journaliste) ne s'en sortent que parce que les grands-parents, retraités, viennent donner un coup de main, au moment des traites quotidiennes, au moment des vêlages, à la fenaison, etc)



C'est tellement facile de clouer au pilori une corporation, sans connaitre le contexte, avec des arguments pour le moins fallacieux.



Quelques éléments : l'arrachage des haies leur a été imposé.

les chambres d'hôtes, qui sont tenues majoritairement par des particuliers, portent la responsabilité de ce que consomment leurs clients. le principe de précaution qui s'impose dans notre pays leur recommande donc le lait UHT. Souvent à leur corps défendant...

comment comparer le goût d'un poulet fermier acheté à la ferme, et celui vendu sous plastique au supermarché (même avec un pseudo label rouge) (j'ai comparé, et il n'y a pas photo) (le poulet de ferme a été nourri bien plus longtemps, ce qui a un coût, dans d'autres conditions) (bien sûr, il peut y avoir des exceptions, on en trouve toujours, mais parlons pour le plus grand nombre, ce sera plus honnête)



15 % de faux bio ? donc 85 de vrai ? formidable. c'est toujours mieux que 0.

sans oublier que la proportion de paysans qui passent à une agriculture raisonnée est croissante. On n'est pas dans le bio, pas encore, mais les doses de chimie s'amenuisent.



Quant aux coopératives, elles ont sauvé une grande partie de notre agriculture.



Oui, nos paysans reçoivent des aides.



Essayez donc de penser à ce que serait notre pays, sans paysans.

On peut, c'est vrai, imaginer de laisser mourir notre agriculture au nom de l'équité.

Allez hop, cette corporation reçoit trop d'aides, on arrête tout ça, ça coûte trop cher. Et il se passera quoi ?



Les terres seront vendues à des promoteurs immobiliers, qui nous bétonneront tout ça bien proprement. Finis les vilains produits chimiques.

Et puis, on pourra toujours aller acheter nos légumes à l'étranger....

C'est vrai que c'est tellement bien contrôlé, dans les autres pays, aussi.



Pur info, et j'en arrête là, le pire des pollueurs ?

Le jardinier du dimanche qui vide son pulvérisateurs de désherbant dans son allée chaque semaine, et arrose son micro potager et ses parterres de fleurs avec ses granules d'engrais et d'anti-limace. Hé oui, 1 + 1 + 1 etc, ça fait beaucoup.

Les collectivités territoriales sont bien placées aussi.